Lorsque la neige paraît...

Alors que Maxime et elle pénétraient plus avant dans la forêt, Selene ne put retenir un léger frisson. Celle ci était si dense que c'est à peine si la faible clarté du soleil parvenait encore, içi et là, à pénétrer la masse épaisse et sombre des arbres. Ceux ci étaient si hauts qu'ils semblaient venir flirter avec le ciel et, dans cette semi pénombre, leurs ombres inquiétantes les faisaient ressembler à des êtres décharnés et moribonds. La neige tombait sans discontinuer maintenant et sous les pieds des jeunes gens la terre se couvrait peu à peu d'un blanc manteau.

Suivant sans mots dire le jeune humain, Selene repensa aux derniers mots qu'ils avaient échangés. Ainsi, malgré tous les dangers auxquels il était quotidiennement confronté, cet homme continuait encore d'espérer ! Il fallait qu'il garde une foi incroyable en la Vie ou qu'il soit bien utopiste pour ainsi ne jamais baisser les bras ! La jeune femme le regarda alors qu'il continuait sa progression à la recherche de ses fameux pièges. Et, malgré l'évidente sympathie qu'elle ressentait pour lui, elle ne put s'empêcher de le jalouser. Qu'avait donc Maxime qui lui avait fait défaut à elle lorsqu'elle était encore humaine ? Pourquoi parvenait il encore à espérer, avec une cette assurance qui confinait presque à de la vanité, qu'il serait le premier à s'enfuir de la Vallée ? Pourquoi réussissait il là où elle même avait échoué ?

Un silence bien anormal régnait sur les bois, comme si l'apparition de la neige avait poussé toutes les âmes encore vivantes de ces lieux à disparaître. Peut être les animaux craignaient ils, eux aussi, ces Bêtes ? Un souffle d'air s'engouffra entre les branches des arbres, provoquant un sifflement lugubre. Selene commençait à se sentir légèrement mal à l'aise. Elle se trouvait bien loin du Manoir, avec pour seule compagnie un humain aussi téméraire qu'elle mais qui, pas plus qu'elle, ne ferait le poids si ces immondes créatures venaient à pointer le bout de leur nez !

S'arrêtant un instant, elle souffla sur ses mains pour tenter de les réchauffer quelque peu, et en profita pour jeter un coup d'oeil aux alentours. Mais elle ne discerna rien. Rien d'autre que la profonde et envoutante pénombre de la forêt. Se tournant vers son compagnon, elle se décida enfin à reprendre la conversation. Selene esperait que parler à cet homme l'aiderait à évacuer cette étrange sensation qu'elle sentait si bien l'envahir et qui l'avertissait d'un danger planant au dessus de leurs têtes.

- " J'admire votre force de conviction mon cher. Bien que je trouve bien présomptueux de votre part d'espérer être le premier à vous éveiller, je souhaite sincèrement que vous ayez raison. Ne me demandez pas pourquoi mais je serais presque heureuse d'apprendre que vous vous êtes réveillé... " dit elle d'une voix à la touchante sincérité.

Mais très vite la jeune femme se reprit, ne voulant à aucun prix laisser un stupide et bien encombrant sentimentaliseme étreindre son coeur. Aussi est ce sur un ton qu'elle voulu bien plus moqueur qu'elle reprit :

- " Mais ne revez pas trop non plus... Les chances qu'une telle chose se produise sont extrêmement minces ! Et, comme vous le dites si bien, il se peut fort que vous finissiez en "Chimère à poil ras". Bien que j'éprouve quelques difficultés à voir ce que cela donnerait, je suis par contre certaine que je serai ravie de me mesurer à une pareille créature... Votre rage et votre folie contre ma célérité et mes quelques autres petites aptitudes ... Cela pourrait être des plus intéressants il me semble, non ? "

La jeune Ombre discourait tranquillement mais son esprit était ailleurs. Elle sentait ses nerfs se nouer les uns après les autres et ses yeux ne cessaient de balayer les environs à l'affût du moindre mouvement. Elle se maudit d'avoir, une fois de plus, succombé à son impulsivité et d'être ainsi partie du Manoir sur un coup de tête. Si encore elle avait eu le bon sens de ne pas s'éloigner des autres, sans doutes se serait elle sentie plus rassurée. Mais non ! Il avait fallut, une fois de plus, qu'elle n'en fasse qu'à sa tête et que malgré tous les rappels à l'ordre dont elle avait été témoin, elle s'aventure seule près de cet humain. Et le pire c'est qu'elle ne lui voulait même pas le moindre mal ! Elle se contentait d'apprécier sa compagnie qu'elle trouvait des plus délicieuses...

- " Vous avez eu bien de la chance que l'Ombre qui vous a trouvé ne vous ait pas fondu dessus. Vous faisiez pourtant une proie bien dépourvue et donc bien facile ! Se pourrait il que vous l'ayez charmée ? demanda t'elle sur un ton malicieux. Quoiqu'il en soit, faites moi penser à l'en remercier si jamais je la croise un jour... Enfin, à condition bien sur que rien de fâcheux ne nous arrive en ces lieux et que nous puissions tous deux réchapper indemnes de cette escapade champêtre ! "

A peine sa phrase achevée, Selene se redressa, aux aguêts. Le bruit, à peine audible d'une branche se cassant. Aussi vive que l'éclair elle se retourna et regarda en direction de l'endroit d'où le bruit lui était parvenu. Elle eut beau plisser les yeux, elle ne vit rien. Immobile un instant encore, elle demeura à regarder la pénombre. Puis, n'entendant plus rien, elle se relâcha quelque peu et adressa un sourire aimable au jeune homme :

- " On dirait que mon esprit commence à me jouer des tours ! J'aurais juré avoir entendu quelque chose... Heureusement pour nous cela ne devait être qu'une illusion. Selene s'approcha alors de Maxime et se postant face à lui : Mais qui sait ? Peut être serons nous obligés de faire bientôt face à un ennemi commun ? Si je suis pour ma part certaine de la conduite que j'adopterais alors, je reste quelque peu songeuse quant à la votre ? Fairez vous front commun avec moi ou non ? "

Il n'y avait, dans la voix de la belle, aucune agressivité ni même aucune peur, lorsqu'elle posa de but en blanc cette délicate et surprenante question. Tout juste un grand calme et une pointe de curiosité.

Il y avait peu de chose capable de lui coller des frissons et cette saloperie de fôret en faisait parti. Mais bon, il n'avait pas d'autre choix que de la parcourir trop souvent à son goût. Néanmoins, il était sur le qui-vive. Perçant, son regard ne cessait de scruter les alentours tandis qu'ils avançaient dans un silence presque parfait. Jetant un coup d'oeil en coup à Sélène, il remarqua qu'elle affectait la même attention que la sienne. Son arme glissa doucement hors de son étui lorsqu'il en saisit la crosse. Un clic, il venait de faire sauter le chargeur et regarda ce qu'il lui restait. Un chargeur complet, soit 6 balles. Il le remis en place en douceur et arma le Smith. Ils marchaient doucement, leurs pas produisaient à peine un son etouffé. Ecrasante, voilà la sensation que l'on avait en pénétrant la foret, un poid qui se loge sur votre poitrine comme un serpent qui se love froid et insidieux. Nan, décidement, il n'aimait pas cet endroit. Plusieurs craquements lui parvint, mais il se contentait de tourner les yeux dans cette direction en continuant à avancer. Puis, la voix de Sélène lui parvint et ce qu'elle lui dit lui attira un rapide coup d'oeil surpris.

-Présomptueux ? Vous trouvez ? Ouais, peut être bien. Mais plus de dix dans l'armée vous fait developper un instinct de survie légèrement scotché à la peau. Assortit à ça que je suis une tête de cochon...Alors ok, je suis tombé je ne sais où mais je sais qu'il est possible de quitter cet endroit et tant que je n'aurais pas eut la preuve du contraire....

Il laissa sa phrase en suspens, accompagnant ses mots d'un sourire en coin. Sourire qui se teinta d'ironie lorsque Sélène voulut « briser » ses espoirs et souligner qu'il serait un adversaire interessant transformé en boule de pus sur pattes.

-Nous mesurer ? Pourquoi pas, mais en attendant, prenez un ticket, la liste est longue.

Mais il devait bien avouer que cela aurait son charme. Non pas qu'il est les idées mal placées, fallait quand même pas déconner, militaire ok, mais bon, sa mère l'avait éduqué quand même. Bon, ok, ça ne se voyait pas au premier coup d'oeil. Sous ses doigts, il sentait la crosse rugueuse de son Smith et la « nervosité » de sa voisine était palpable. Il ne connaissait que trop cet état d'esprit et avait apprit à le mater. A être trop nerveux on en faisait des conneries. Il inspira profondément, silencieusement. Il laissa même un rire étouffé s'échapper de ses lèvres lorsque l'Ombre avança l'hypothèse qu'il ait charmé Mirahil.

-Il est sur qu'elle aurait put me tuer, sans sommation, ni explication. Mais elle ne l'a pas fait. Pourquoi ? Ça mystère, mais le fait est là. Quant à l'avoir charmé, je doute. Mirahil est...Spéciale, même parmis les siens, donc je ne dirais pas que mon charme ravageur ait eu un quelconque effet sur elle. Peut être la curiosité, comme vous. Je doute que vous ayez succombé à ma virile aura. Allez savoir. Je ne me pose pas la question. Mais peut être qu'un jour je le lui demanderais.

Il enjamba une branche sur le sol, avec une grâce étonnante chez un homme de sa corpulence, mais il était capable de se mouvoir avec une très grande fluidité.

-Bien sur qu'on va sortir de là. De toute manière nous n'avons pas le choix n'est ce pas ?

Ajouta-t-il moqueur avant que tout ne s'emballe lorsque Sélène se retourna brusquement. D'instinct, il pivota sur lui même et braqua son arme droit devant lui, avant de relever le canon vers le ciel lorsqu'elle s'excusa.

-La foret recèle de pas mal de bestioles. Certaines sont inoffensives mais d'autres...Enfin, mieux vaut faire gaffe à nos petites fesses.

Il haussa un sourcil lorsqu'elle se posta devant lui et baissa la guelle de son arme sur le sol. Ses paroles le firent sourire avec quelque chose de carnassier.

-Voyons....Compte tenu de votre désir de m'affronter un jour, je ne vais pas laisser à quelqu'un d'autre le plaisir de m'achever. Compte tenu que j'ai relevé le défi, je ne compte pas non plus laisser quelqu'un d'autre vous tuer, donc, 1+1=2.

Ses prunelles vertes, luisaient avec amusement. Une manière peu commune de dire que oui, ils feraient front commun. L'ennemi de mon ennemi est mon ami, était une phrase qui ne s'appliquait pas dans le cas, par contre, l'union fait la force...ça, ça marchait. Il la coutourna.

-Venez, ce n'est plus très loin. Heureusement que j'ai un sens de l'orientation bien développé, sinon, cette foutue neige nous perdrait. Enfin, au pire des cas, il y a une grotte pas loin si ça sens le roussi.

Ironisa-t-il avec un léger signe de tête.

Selene sourit vaguement à l'évocation de la grotte. Elle connaissait bien cet endroit pour y être déjà venue plusieurs fois. Lorsqu'elle était encore humaine c'était un lieu où elle aimait à venir se réfugier et s'isoler des heures entières, laissant alors ses pensées divaguer sur sa vie d'avant son arrivée dans la Vallée. Plus tard, devenue Ombre, c'est aussi là qu'elle venait se repaître de ses proies humaines. Sur les parois rocheuses on pouvait encore voir les traces de sang que ses victimes avaient laissées en s'écorchant les doigts lorsqu'elles avaient désespérément tenter de lui échapper. Maxime avait raison... Si jamais la situation venait à se corser ils trouveraient là bas un bien salutaire asile !

Elle suivit sans ciller le jeune homme qui progressait avec souplesse et aisance, un peu comme s'il eut connu ces lieux par coeur. Peut être était ce du à son passé de militaire ou à son physique d'athlète, toujours est il que l'agilité de l'humain était assez impressionnante et curieusement, il tardait à Selene de pouvoir se mesurer à lui. Voilà un adversaire qu'il lui plaisait de pouvoir affronter... même si elle n'était pas vraiment certaine d'apprécier tout autant l'issue d'un tel combat. Qu'elle gagne ou qu'elle perde l'idée ne la réjouissait guère en fait...

Aussi stupide que cela puisse lui paraître, la compagnie de Maxime semblait avoir raviver en elle un sentiment d'humanité qu'elle pensait pourtant éteint à jamais. Son farouche espoir qu'il gardait chevillé au corps, son envie de vivre ou plutôt de survivre envers et contre tout, sa capacité à garder un bien désopilant sens de l'humour... Tout cela respirait tant la Vie qu'elle même se surprit à en être touchée, pour ne pas dire émue. Se pouvait il qu'elle soit encore, un tant soit peu, humaine ? Non ! Cela ne pouvait ni ne devait être ! Sinon comment pourrait elle encore continuer à vivre en tant qu'Ombre ? Comment pourrait elle encore supporter son existence emplie seulement de rancoeur et de violence si inhumaine ? Se laisser aller à éprouver des sentiments humains, quels qu'ils puissent être, équivalait à se montrer faible au point d'en devenir vulnérable. Autant se laisser mourir içi et maintenant alors... Le visage de Selene se ferma subitement. Elle ne pouvait se permettre la moindre faiblesse, le moindre sentimentalisme ! Et encore moins maintenant qu'elle était au milieu de ces bois maudits à courir après de stupides pièges à lapins !

Le froid était si rude à présent que la jeune femme sentit peu à peu ses membres s'engourdir. Afin de ne pas laisser cette sensation glacée envahir tout son être, et sous prétexte d'inspecter les alentours, elle sauta en l'air s'agrippant à une basse branche. Usant de toute sa souplesse et de toute l'agilité dont elle était capable, Selene se hissa de branche en brache jusqu'au plus haut de l'arbre.

De là elle pouvait admirer la Vallée dans toute son intégralité. Etrange endroit que ce lieux qui recelait de tellement de dangers mais qui pourtant n'était pas dénué de charme. Du haut de son perchoir, Selene pouvait distinguer l'ombre du Manoir qui commençait peu à peu à se recouvrir de neige lui aussi. L'espace d'un instant son coeur se pinça : elle aurait, et de très loin, pouvoir poursuivre sa discussion avec Maxime, bien tranquille au coin du feu dans sa chambre plutôt qu'içi où elle commençait à littéralement geler !

Abaissant les yeux, elle aperçut, un peu plus loin au nord, une forme qui lui sembla être celle d'un pauvre lapin pris au piège dans l'un des collets du jeune homme. Elle ouvrit la bouche pour l'en aviser lorsque son attention fut retenue par tout autre chose. Là, à quelques mètres seulement de l'endroit où ils se trouvaient, des branchages avaient été cassés et reposaient à même le sol. La jeune femme n'y aurait guère prêté plus d'intérêt que cela si deux choses ne l'avaient intriguée. Si les branches avaient été cassées il y a longtemps la neige les aurait déjà recouvertes or ce n'était pas le cas... Et ces empreintes de pas juste à côté, profondes et distinctes, étaient bien trop visibles pour ne pas être récentes ! Cette fois c'était certain : ils n'étaient pas seuls !

Selene, redescendit lestement et silencieusement sur la plus basse branche et faisant signe à Maxime de s'approcher, elle lui murmura :

-" Cette fois ce n'est pas mon imagination... Nous ne sommes pas seuls ! Puis, en désignant d'un signe de la tête la direction où elle avait vu les traces de pas Des branchâges sont cassés et il y a aussi des empreintes toutes fraîches...Qui que ce soit il ne tient pas plus que nous à être repéré..."

Etrangement Selene n'avait pas peur. Au contraire, cette confrontation probable la ramenait à la réalité, venant ainsi étouffer toutes ces préoccupations bien trop humaines pour elle. Pas encore décidée à rejoindre son compagnon sur la terre ferme, elle s'acroupit sur sa branche et serrant sa dague au creux de sa main, observa le fringuant Maxime.

- " Que diriez vous de partir en chasse de quelque chose qui s'annonce comme bien plus gros qu'un lapin ? Quoi que ce soit nous pourrons ainsi nous dégourdir quelque peu les jambes... Rien de tel qu'une bonne petite partie de chasse pour vous revigorer le corps et les sens, vous ne trouvez pas ? "

La voix de la jeune femme était chaleureuse et des plus suaves. Dans le noir de ses yeux une petite lueur s'anima, telle une flamme, signe d'impatience et de plaisir. Selene redevenait peu à peu la prédatrice qu'elle avait toujours été : froide et sans la moindre pitié. Tenant sa dague serrée entre ses dents, la jeune femme sauta à terre et alla rejoindre son compagnon. Laissant un regard mutin mais parfaitement désinteressé trainer sur le postérieur du jeune homme elle lança d'une voix railleuse :

- " Vous parliez de nos "petites fesses" ? Que diriez vous de bouger les votres, au demeurant charmantes, pour venir voir avec moi de quoi il retourne exactement ? "

Du coin de l'oeil, juste du coin de l'oeil. Un regard en biais dont il la couve. Maxime n'a jamais réellement comprit le mécanisme des Ombres. Il sait comment elles le deviennent mais...C'était étrange. Pourtant, il ne pouvait pas dire que Sélène présentait la « tristesse » caractéristique des Gris, même Mirahil possédait cette forme de grisaille. Mouais, étrange, mais il n'était pas là pour verser dans la psycho de bas étage.

Il remarqua qu'elle souffrait du froid et réfléchit quelque instants sur la marche à suivre, avant de soupirer, une chance sur deux qu'elle refuse mais elle ne pourrait pas dire qu'il n'avait rien fait ! D'un geste rapide, il se délesta de sa doudoune. Frissonnant à son tour sous la morsure du froid, mais il était tout de même bien plus habillé qu'elle. Il la lui tendait lorsqu'elle disparut soudain pour grimper dans un arbre. Souriant à demi, il secoua la tête avant de renfiler le manteau.

Bon sang ! Il detestait cet endroit. D'ailleurs, il n'y avait que la perspective de crever de faim qui le faisait y aller. A croire qu'il était le seul mec avec des baloches assez balèze pour s'y risquer tout seul comme un grand. Suicidaire surtout. Un pas après l'autre, toujours en silence, il avançait en attendant l'Ombre. Il se demanda un instant ce qu'elle fichait, mais n'était pas vraiment inquiet. Si elle décidait de l'attaquer, il lui faudrait se matérialiser et il doutait qu'elle l'égale au corps à corps pur. Son regard ne cessait de furter à droite et à gauche, l'oreille tendue. A tel point qu'il n'eut aucun sursaut lorsque Sélène réapparut..encore perchée sur un arbre...

-Si votre ramage...

marmonna-t-il avant d'hausser un sourcil lorsqu'elle le renseigna sur une présence probable. Et merde ! Il grommela un truc dans sa barbe mais redoubla d'attention. La jeune femme sauta de l'arbre, avec un air des plus...Sadique sur le visage. D'instinct, il se tourna dans la direction qu'elle indiquait, déjà, l'homme laissait lentement la place au militaire.

-Vous réjouissez pas trop vite, jolie Séléne, on peut très bien tomber sur plus fort que nous.

La prévint-il alors qu'elle reluquait, narquoise, son postérieur.

-Mais...L'effet de surprise peut nous donner l'avantage, et vous n'avez pas tord, ça nous réchauffera.

Ajouta-t-il avec une étincelle de glace au fond des yeux. Il était en guerre.

Invité

Le craquement d'une branche, les traces de pas, la végétation dérangée...tous les signes étaient là : Maxime et Sélène n'étaient pas seuls, et les deux chasseurs étaient prêts au pire, parés à tuer et à fuir. Mais rien au monde n'aura pu les préparer au spectacle et à la surprise qui s'abattirent sur eux comme une nuée funeste de...

Enfin bref, un cerf sorti de nulle part, qui avait sûrement eu la chance d'échapper aux Ombres chaseresses que Sélène avait si prestement abandonnées pour se trouver seule à seul avec le Chasseur Humain. Mais si cet innocent animal expliquait par sa présence les bruits et les branches, on voyait bien à ses sabots qu'il ne saurait être considéré comme responsable pour les traces...quelqu'un d'autre était là.

Ce fut alors qu'il le remarquèrent, marchant aux côtés du cerf comme une araignée en costume cravate, silhouette translucide et dégingandée, à peine discernable dans ce décor immaculé. Mais le plus étrange était sa voix. Qui s'adressait à l'animal.

Et vraiment, ça ne me surprend pas, j'ai déjà eu une très longue conversation avec un écureuil... dit-il d'un air pensif, avant d'ajouter une judicieuse remarque. Bien plus longue et intéressante que les conversations que j'ai avec la plupart des humains, en fai...

Il s'interrompit en voyant braqué sur lui et son interlocuteur deux paires d'yeux dont le regard aurait percé une plaque de fonte, tout un jeu de dagues et un revolver chargé jusqu'à la gueule. La pauvre bête se mit à trembler de tous ses membres, et était sur le point de prendre la fuite sans demander son reste, lorsque l'individu posa sa main sur son échine et chuchota à son oreille.

Bon, il vaut mieux que tu y ailles, Jack...Tâche de pas te faire bouffer, et n'oublie pas la conclusion à laquelle on est arrivé sur le sens de la vie...

Il se pencha un peu plus vers le cerf, comme pour lui faire une confidence, mais haussa la voix avec un ton de faux conspirateur.

Y en a pas ! Laisse tomber, Jack, laisse tomber je te dis...et à plus.

D'une petite tape sur la croupe, il fit fuir le cerf à toutes jambes, puis se retourna vers les deux Chasseurs, un rictus gêné sur son visage émacié d'une pâleur de mort. Marchant vers de sa démarche démesurée, une main dans la poche, l'autre levée en guise de salut, il hêla sa congénère.

Te voilà, mon coeur ! Je me suis fait un sang d'encre quand tu t'es éclipsée, j'ai dû te chercher pendant... fit-il sur un ton d'inquiétude surfaite, hésitant soudain sur le temps. Cinq bonnes minutes...Dans cette forêt enneigée, tu te rends compte ? Il regarda nerveusement autour de lui, avant de marmonner entre ses dents.On sera tous déchiquetés d'ici cinq secondes...

Approuvant du chef, il sembla soudain prendre conscience de la présence de Maxime. Gardant sa consistance translucide, il se recula d'un demi-pas tandis que ses longs doigts blanchâtres s'agitaient nerveusement, en un ballet à peu près aussi étrange que le reste de ses mouvements. Sa voix était un murmure dissonnant très étrange, entre une corde de violon et une bourrasque d'hiver qui aurait l'accent anglais.

Tu... avança-t-il avec réticence. Bavardais avec Monsieur ?

Selene restait là, immobile, complétement décontenancée par l'apparition de son ami. Sur toutes les créatures dont regorgeait la forêt il avait fallu que ce soit lui qui croise leur route ! Cela aurait pu être une Chimère pleine de hargne avec qui ils auraient pu se battre... Ou l'une de ces affreuses bestioles qui ne sortent que par temps neigeux... Ou pourquoi pas un humain ? Mais non ! Il avait fallu que ce soit Yorick !

Soupirant longuement, Selene rangea son arme et fit signe à Maxime d'en faire autant. Yorick, quant à lui, continuait tranquilement de s'entretenir avec ce cerf. Apparemment il tentait de lui expliquer le sens de la vie... Du Yorick tout craché ! Il n'y a pas si longtemps Selene l'avait trouvé en grande conversation avec un écureuil et elle aurait même pu juré qu'elle l'avait déjà vu parler à une chaise ! L'espace d'un instant elle se demanda même comment le pauvre cerf avait fait pour ne pas succomber aux paroles, tellement pessimistes qu'elles en devenaient souvent assassines, de ce grand échalas !

En d'autres circonstances, Selene aurait rit de bon coeur au spectacle que l'Ombre lui offrait une fois de plus. Derrière ses allures parfois grotesques, Yorick était un être qu'elle appréciait. Et lorsque celui ci ne faisait pas le pitre, il pouvait même se montrer d'une rare profondeur. Mais aujourd'hui, la jeune femme n'était pas d'humeur à plaisanter. Bien qu'elle sache Yorick capable de tenir sa langue, elle aurait préféré ne pas être vue en compagnie de Maxime. Une Ombre et un humain discourant et chassant ensemble, cela pouvait faire jaser ! Et puis, l'endroit et le moment étaient plutôt mal choisis pour tenir un salon de thé et papoter gaiement ! Qui sait ce que la forêt leur réservait encore comme surprise ?

Selene, semblant subitement sortir de ses pensées, remarqua le regard de l'Ombre se poser sur Maxime. Amusée et presque attendrie, la jeune femme posa son regard sur le bel humain et, se hissant jusqu'à son oreille lui murmura doucement :

- " Méfiez vous des apparences... Il ressemble peut être à une araignée syphonée mais il est un redoutable adversaire quand il le souhaite. Et il m'est avis que votre présence à mes côtés n'est pas faite pour lui plaire... Yorick à parfois tendance à se montrer protecteur envers moi... "

Puis, elle se retourna vers la silhouette déguingandée et lui adressa un regard bien plus tendre qu'elle ne l'aurait souhaité. Délaissant pour un instant, et presque à regrets, le militaire, elle alla à la rencontre de son ami. Se postant juste derrière lui, elle attendit qu'il se matérialise complètement puis, appuyant sa tête au creux de son épaule, lui dit de sa voix douceureuse :

- " Yorick... Permets moi de te présenter ce "Monsieur" avec lequel en effet je discutais avant que tu ne viennes nous interrompre. Il s'appelle Maxime et, non, tu ne rêves pas il est bien humain. "

Puis Selene s'éloigna un peu et vint se coller contre un arbre, à mi distances entre les deux hommes. La neige tombait de plus en plus fort et formait comme un voile cotonneux devant ses yeux, l'empêchant presque de distinguer les traits de ses compagnons. Se tournant vers Maxime, elle continua les présentations :

- " Maxime... Je vous présente Yorick, sans nuls doutes la plus pessimiste d'entre toutes les Ombres. Et aussi un ami... malgré le don qu'il semble avoir de pouvoir me faire sortir de mes gonds ! railla t'elle. Puis, lançant un regard dubitatif à la silhouette grise, elle lui demanda, de façon presque agressive : Mais dis moi Yorick... Que diable es tu venu faire içi ? Et ne me sors pas l'une de tes excuses toutes faites enrobées d'un calembourg, vu ! Je te connais trop bien pour gober cela... Tu ne te serais jamais aventuré, seul qui plus est, dans ces lieux froids et dangereux sans une bonne raison... ou si l'on ne t'y avait poussé. "

Au moment où elle prononçait ces mots, une idée traversa l'esprit de la jeune femme. Yorick était il vraiment venu de son propre chef à sa recherche ? Il en eut été parfaitement capable mais...

" Réponds moi : est ce bien ton idée de venir me chercher ? Et pourquoi faire d'ailleurs ? Je suis très bien içi ! Et si tu envisages de me ramener au manoir, et même si on t'avait demandé de le faire, je ne rentrerais pas ! Je passe un excellent moment avec Maxime et je n'ai pas envie d'y mettre fin. Maintenant, toi, tu fais ce que tu veux : tu restes avec nous ou tu pars, cela m'est égal ! "

Selene s'en voulut de se montrer aussi dure avec Yorick, mais elle ne supportait pas de se sentir espionnée ni même surveillée ou protégée... C'était la première fois depuis sa rencontre avec Maxime qu'elle perdait ainsi son sang froid et se montrait aussi agitée. Ne tenant plus en place, elle marchait de long en large, soufflant sur ses mains pour tenter de les réchauffer, le nez rivé au sol. La jeune femme devenait de plus en plus nerveuse. Tentant tant bien que mal de se calmer, elle retourna se poster à côté de l'humain et lui sussura presque :

- " Je suis désolée de cette interruption... Croyez moi, notre petite promenade m'enchantait et l'idée de chasser tous les deux n'était pas pour me déplaire... "

Plus on est de fous...Il avait une chance in-cro-yable aujourd'hui. L'oeil froid, il scrutait le nouveau venu. Un grand machin tout sec, ouais, ça lui faisait penser à un haricot, un grand haricot même pas comestible. Ben il en avait vu des mecs bizarres dans sa vie, mais celui là remportait le pompom.

-L'Ombre qui murmurait à l'oreille des pitits nanimaux...Tout à fait mignon.

Grommela-t-il en rangeant son arme dans l'étui fixé à sa cuisse. Sélène chuchota un truc a son oreille et il pencha la tête du coté du murmure sans quitter l'autre du coin de l'oeil avant d'hocher la tête. Un des potes à elle. Le cerf qui l'accompagnait retourna dans la forêt et il eut un sourire désabusé. Bon, il ne restait plus que les pièges. Croisant les bras sur la poitrine, il leva les yeux au ciel. Il neigeait toujours et il espérait que cela ne s'aggrave pas, en attendant, il ne cessait de regarder le nouveau tout en analysant ce que lui avait dit Sélène. Encore un qui devait se nourrir du desespoir humain. Donc un fin connaisseur de la mécanique humaine, et comme 1+1=2, un mec dangereux. Il les laissa parler, il n'avait rien à dire pour le moment. Mais à en juger par les actions de Sélène, ils devaient être amis. Elle fit les présentations, et Maxime se contenta d'un vague signe de tête, crucifiant de son regard émeraude le nouveau venu. La prochaine qui se targuait d'avoir un coeur de glace provoquerait un monstrueux éclat de rire de la part du militaire ! Ca, c'était clair. Les Ombres étaient, au même titre que les humains, secouées de sentiments, elles auraient beau dire le contraire, il n'y croierait plus, si tant est qu'il y ait cru un jour.

Bien campé sur ses deux jambes, il attendait. Oh, il n'attendrait pas longtemps, il devait ramener de la viande mais juste le temps de s'assurer qu'on ne lui sauterait pas dessus dès le dos tourné. Surtout que le Grand Haricot n'avait pas l'air d'être de ces gars hyper chaleureux avec les hommes, sauf lorsqu'il s'agissait de les bouffer. Levant une main, il se massa l'arrête du nez entre le pouce et l'index en grommelant un truc inaudible. Sélène laissa paraître sa nervosité et il lui jeta un coup d'oeil aigue. Evidement, la situation était...Tendancieuse. Il braqua son regard dans celui de l'ombre en répondant :

-Il y aura d'autres chasses, n'oubliez pas l'enjeu, ma vie ou la votre...

Ouh, le gros mensonge ! Mais il était doué pour ça. Une manière idéale pour faire croire qu'ils s'étaient mis en compétion à la chasse pour déterminer qui traquerait l'autre par la suite. Lui ? Tenter de sauver la peau d'une ombre ou du moins sa réputation ? Meuuh...Ouaip. Restait plus qu'a espérer que Sélène soit assez fine pour deviner le subterfuge.

Invité

Avec un sourire attendri légèrement caricatural, Yorick reprit consistance pour laisser Sélène appuyer sa charmante tête sur son épaule. Sourire qui se mua en moue mi-boudeuse mi-soucieuse lorsqu'il vit la jeune femme devenir de plus en plus nerveuse. Mais lorsqu'elle s'adressa à lui avec agressivité, son air de chien battu fut si surfait que même lui finit par en rire.

Prenant un rictus forcé, il vint se placer à portée de main de Sélène, visiblement peu enchanté de la familiarité qui s'était établie entre elle et Maxime. En un geste délicat, il ébouriffa les cheveux de jais de l'Ombre et lui parla comme à un jeune enfant.

Oh, regardez-moi ça...c'est de pire en pire chaque jour, tu sais : de plus en plus vieille, de plus en plus laide, et de moins en moins polie... fit-il, renonçant à lui pincer la joue après un coup d'oeil à son jeu de dagues. Elle est pas adorable ? ajouta-t-il à l'intention de Maxime.

J'étais juste sorti pour...voyons voir...marmonna Yorick avant de compter sur ses doigts. Premièrement parce que tu es sortie sans me prévenir, deuxièmement histoire de tailler une bavette avec les éventuels nouveaux arrivants, et troisièmement parce que pour je ne sais quelle raison, je me sens une envie de me promener dans les bois en ce moment...

Même si son ton suggérait plus "pluie, beau temps et tasse de thés" que "neige, mort certaine et bêtes horrifiques", le fait qu'il regardait nerveusement autour de lui indiquait qu'il avait bien conscience que le loup était dans les bois...Ce qui ne l'empêcha pas de se dévêtir de sa veste et de la déposer sur les épaules de Sélène lorsqu'il vit celle-ci tenter de se réchauffer.

Nom d'un Manson en papier mâché, il fait froid...grelotta-t-il avant d'ajouter à l'adresse de la jeune femme. Ne dis pas que je ne suis jamais mort de froid pour ton petit confort personnel, ma vieille...

Très bizarrement, le froid ne semblait plus tant l'affecter lorsqu'il tendit une main incroyablement frêle et pâle à Maxime, comme s'il ne grelottait que pour se mettre en scène.

Enchanté...vous pouvez m'appeler Yorick : vous avez dû entendre parler de moi, je faisais le crâne dans Hamlet.

La plaisanterie était bien sûr lamentable, mais un homme aussi vigilant que Maxime pouvait voir qu'il y avait plus chez Yorick qu'un humour pathétique : que ce soit ses gestes grotesques, son aspect démesuré et surtout ses yeux félins et d'une froideur inhumaine, quelques détails disaient à l'homme avisé de se méfier du clown qui dort.

Je vois que vous étiez dans une humeur nemrodienne...Où est Jack quand on a besoin de mettre brutalement fin à sa vie, pas vrai ? dit-il sur un ton d'une légèreté parfaite. En parlant de ça, il y a une question que je dois vous poser, je la pose à tous vos collègues : vous croyez encore que vous allez vous réveiller ?

Ses yeux aux minces pupilles s'étaient soudain braqués sur le visage du Chasseur, et son ton profondément intéressé ne laissait présager rien de bon...

Rien n'énervait ni n'attendrissait plus la jeune femme que cette façon si particulière qu'avait Yorick de la mettre en boite. Il eut s'agit de n'importe qui d'autre qu'elle lui aurait déjà administré une giffle magistrale, mais devant cet homme, Selene se montrait bien trop souvent faible. Aussi accepta t'elle de bon coeur la veste qu'il déposa sur ses épaules et elle ne broncha même pas lorsqu'il vint, comme à l'accoutumée, lui ébouriffer les cheveux.

- " Que veux tu mon cher, près de trois décennies passées dans cette sombre Vallée, clea suffit amplement à ternir n'importe quelle beauté ! " dit elle d'une voix aimable cette fois ci. Et si toi tu persistes à me trouver adorable malgré tout ce que je te fais endurer depuis toutes ces années, je connais plus d'un compagnon de Maxime qui t'affirmerait le contraire... enfin s'ils étaient encore vivants ! "

Allant même jusqu'à se fendre d'un sourire, elle caressa tendrement la joue de l'Ombre puis s'éloigna légèrement de lui. Debout aux côtés du fringuant militaire Selene écouta patiemment son ami énumérer les raisons de sa venue en ces lieux. Incroyable ! Peu importe la situation dans lequel celui ci se trouvait, Yorick ne pouvait s'empêcher de toujours tout tourner à la dérision ! Pourtant, Selene lut dans ses yeux que derrières son air insouciant, son ami était parfaitement conscient du danger qui les guettait. Derrière n'importe lequel de ces fourrés ou de ces arbres, c'est peut être la Mort qui les attendait tous les trois... Peut être était ce même ce qu'elle était venue chercher içi après tout ?

-" Premièrement : je ne vois pas pourquoi je devrais te prévenir à chaque fois que je sors... Tu n'es ni mon père, ni mon mari... Et si je prends soin de n'avertir personne même pas V...enfin tu sais qui, ce n'est certes pas pour t'avertir toi ! si je vous écoutais je vivrais cloitrée dans le manoir... ajouta t'elle, reprenant dans l'ordre, les arguments de son ami. Deuxièmement : je doute qu'avec ce temps et cette foutue neige qui ne cesse de tomber depuis plusieurs heures maintenant, oui, je doute fort que tu ais la moindre chance de croiser qui que ce soit ! Et troisièmement, en parlant de cette satanée neige et des bêbêtes qu'elle fait sortir de leurs trous... Tu es cinglé ou quoi ! Tu veux vraiment finir déchiqueté entre leurs mâchoirs ? Toi qui répugnes à te battre tu veux me faire croire que tu avais envie de te ballader dans les bois ? Et je fais quoi, moi, s'il t'arrive quelque chose ? Tu es certainement le plus horripilant des amis et j'ai souvent envie de t'étriper mais... pas au point de souhaiter ta mort ! " lâcha t'elle dans un souffle .

Puis, voyant Yorick s'approcher de son compagnon humain, elle se précipita à son tour. Elle connaissait bien ce regard sombre qu'affichait yorick et cela ne laissait rien présager de bon. Quelles que puissent être ses intentions, elle espérait que sa présence suffirait à le dissuader de tenter quoique ce soit de stupide... comme tenter d'assaillir le bel humain de son torrent habituel de paroles !

Légèrement anxieuse, elle se positionna entre les deux hommes, faisant face à l'humain. Elle avait apprécié la délicatesse dont avait fait preuve ce dernier en taisant la nature exacte de leur promenade. Bien que la vérité ne soit pas si éloignée que cela ! Sans même s'en rendre compte, elle s'était rapprochée de lui et avait posé sa main sur la sienne, comme si elle avait voulu par ce simple geste le remercier de son attention. Elle eut pu le dire avec des mots, mais parler n'était pas son fort dans ces cas là et puis la présence de l'autre clown l'en empêchait de toutes façons !

- " Ne l'écoutez pas Maxime... dit elle doucement. Puis, réalisant que sa main était toujours sur celle de l'humain, elle l'enleva prestement et les joues toutes empourprées, poursuivit : Yorick à un don bien particulier : il agace et exaspère à peu près tout le monde avec son humour nir et ses questions bien mal choisies ! N'est ce pas ? acheva t'elle d'une voix sourde et légèrement menaçante. Elle se retourna vers l'Ombre et ne put retenir un sourire malgré sa colère : Yorick s'était toujours montré charmant avec elle et elle avait mauvaise grâce de le traiter aussi durement. Son visage se radoucit quelque peu et elle se retourna une ultime fois vers Maxime, l'oeil pétillant : Votre vie ou la mienne... Je n'oublierai pas, soyez en certains ! C'est une promesse qu'il vous faudra tenir charmant humain sans quoi vous me décevriez beaucoup. Et, en parlant de vie, j'avoue que la question de Yorick est pour une fois bien pertinente, bien que fortement interressée je le crains... "

Les flocons continaient de tomber, formant sur le sol un épais tapis blanc et Selene se dit qu'il s'agissait là d'un bien étrange lieu pour une conversation toute aussi étrange...

Le militaire avait suivit du regard les simagrés de l'ablette. Geste calculés, gracieux par bien des côtés. Modulation de la voix parfaite. Attaque, réponse. Plutôt fendar leur échange et cette pensée amena un léger sourire sur les lèvres de Maxime. Il était gonflé l'échalas de venir se promener dans les bois tout seul et non armé. Du moins de ce qu'il en voyait. Il en soupçonna la raison à travers ses paroles, de même que la réponse de Sélène. Encore un amoureux transi. Et bien, la belle réputation de sans coeur des Ombres venait d'en prendre un sacré coup ! Il ne broncha pas devant la main tendue et il la serra sans quitter les yeux du Haricot Sec. Au contraire de Sélène son contact était glacé, il n'aimait pas ça. Cependant, l'asperge fit preuve de galanterie en déposant son manteau sur les épaules de la jeune femme. Une chose qu'il avait faillit faire, un geste bien humain. L'envie de prendre soin d'une personne chère. De là a dire que Sélène était une proche, fallait pas pousser mémé dans les orties, mais il avait du respect pour elle, respect né dans le défi. Le respect de l'adversaire qui empêche tout coup bas.

La grande asperge lui posa LA question que tout le monde lui avait posée au moins...Un millier de fois et il remarqua :

-Faudrait peut être faire preuve d'un peu plus d'originalité non ?

La dessus, Sélène se planta entre eux deux et il baissa les yeux sur son beau visage. Il sentit le léger contact de ses doigts sur les siens, mais lui fit grâce de ne pas le relever de façon trop...Voyante. Manquerait plus que l'autre légume lui fasse une crise de jalousie aigue. Sélène lui dit de ne pas prêter attention aux paroles fielleuses de son ami et il laissa un coin de sa bouche se relever.

-Je ne suis ni agacé, ni exaspéré...Juste..Déçu, je m'attendais à plus de nouveauté dans une question dont...Il leva les yeux sur le grand machin, vous connaissez la réponse. Pendant que j'y suis, pas la peine de me sortir le baratin habituel du « oui, mais tu ne verra jamais la fin de ton périple, tu es prisonnier à jamais et blablabla, et blablablabla »...On me la assez fait.

Il leva deux doigts a sa tempe en un simulacre de salut militaire lorsque Sélène lui parla de leur « pari ».

-Je tiens mes promesse m'dame !

Avec un accent purement imité. Non, il n'oublierait pas, impossible et il comptait bien tenir cette promesse, même si cela lui prenait quelques années.

-La question est pertinente mais répétitive. Je ne vais pas user ma salive encore pour ça.

Invité

Ecoutant les reproches de Sélène avec un sourire, l'ex-comédien se pencha alors sur elle et pinça espièglement sa joue.

Si c'est pas mignon...Voyez la gentille fille qui me reproche d'être sorti et qui veut que je m'inquiète de ma sécurité...L'hôpital vient de violer et d'égorger la charité, là...Tu es en plein bois enneigé, seule, en tête-à-tête avec un humain armé et dangereux...Je peux savoir ce qui t'est passé par la tête, mon adorable petite sotte ?

La question était manifestement rhétorique, et dite sur un ton d'une rare badinerie : on aurait dit une partie de tennis, comme s'il se renvoyait reproches et répliques par simple divertissement. Et si on pouvait sentir une complicité entre eux, on ne pouvait pas non plus nier que le grand échalas était assez difficile à lire. Tant de choses chez lui étaient surjouées qu'on avait du mal à trouver les éléments sincères. Si tant est qu'il y en ait.

Puis, Yorick écouta patiemment Maxime exprimer sa déception. Il encaissa sans broncher ses reproches et le regarda stoïquement échanger sa complicité avec Sélène. Mais au fur et à mesure, ses doigts se tortillèrent de plus en plus, sa lèvre inférieure trembla imperceptiblement, et ses yeux se dilatèrent dangereusement.

Une fois que le Chasseur eut fini de parler, il s'approcha très lentement de lui et avança son visage vers le sien, le côté gauche en avant, presque sourcil à sourcil. Un silence de plomb s'était déposé sur la scène. Ses gestes étaient lents et délicats tandis qu'il posait sur les épaules de Maxime ses mains qui étaient comme de grandes araignées d'albâtre. Et on aurait dit que son regard seul pouvait faire apparaître des engelures.

Allez vous faire ******, lâcha-t-il avec une légèreté presque surréaliste. Vous êtes original devant votre repas, vous ? Original...J'aurais pu vous écorcher vif à n'importe quel moment, et vous me trouvez pas assez original ?

Sa voix devenait de plus en plus dure et tranchante, avec une lenteur affectée et un ton insouciant incroyablement dérangeant.

Est-ce que vous savez même ce qu'est l'originalité, monsieur le foutu militaire de mes deux ? Vous vous croyez original, à jouer au déni ? Vous avez peur et vous avez trop peur de vous-même pour vous l'avouer, et vous vous croyez original ? J'ai regardé des gens comme vous se suicider après dix minutes de conversation et vous vous croyez original ?

Sa main droite se replia, l'index pointé vers le visage du Chasseur, tandis que sa main gauche de rapprochait de sa gorge. A mesure qu'il parlait, il semblait grandir, dépassant de plus en plus Maxime.

J'allais vous féliciter et vous parler des effets pannes de courants sur les respirateurs, et vous comme un con vous avez gâché mon effet...Vous êtes d'une impolitesse crasse juste parce que j'essaie de vous faire sombrer dans le désespoir et vous vous croyez original ? Je vais vous en donner, moi, de l'originalité, pauvre sac d'os...

Il murmurait presque dans le cou du Chasseur, et ses doigts froids comme la glace effleuraient presque sa carotide...Penché sur l'Humain comme un sinistre arbre rabougri, il prit une longue inspiration qui faisait penser au sifflement d'une faux...

Vous aimez Sinatra ?

La badinerie était revenue comme un coup de tonnerre, et la question parfaitement innocente, dite dans une position pareille et après tant de menaces, ne manquait pas...d'originalité.

Juste un sourcil. Il ne bougea juste un sourcil. Une erreur que l'Ombre faisait, une grosse érreur à moins d'être capable de le contrer au corps à corps. Prendre matière était une erreur oui, et une belle, surtout en s'approchant si près de lui. Oh, il était tenté le militaire, ça lui défoulerait les nerfs, mais il n'en fit rien. Il affronta sans ciller le concentré d'azote liquide qu'était les yeux de l'asperge. En plus il comptait lui faire peur ? Pour un peu, il lui aurait explosé de rire au nez. Il le regarda faire son petit numéro sans broncher, il se croyait terrifiant, il se croyait horrible...Il était surtout pathétique aux yeux de Maxime. Très pathétique. Le militaire le laissa déblatérer ses conneries et leva doucement une main. Main qui se referma sur le poignet de l'Ombre. Des doigts qu'il éloigne lentement alors qu'il aurait pu l'envoyer se faire voir ailleurs d'un seul mouvement.

-Vous permettez ? On est pas assez intimes. Je vous emmerde également si ma réponse vous dérange allez déblatérer aux oreilles des rats. Je n'ai jamais prétendu être original mais une chose de sure, j'ai plus de « mes deux » qu 'un machin qui pique sa crise parce que sa petite comédie du « je vais te foutre une trouille monstre » n'a pas l'effet escompté. Sacré égo en plus d'un super penchant pour la tragédie. Tu veux me faire peur ? Trouve autre chose. Mais si c'est là tout ce que vous avez trouvé pour vous faire remarquer aux yeux d'une certaine Ombre...

Il le lacha subitement, et recroisa les bras sur la poitrine en braquant un regard narquois sur l'asperge.

-Essayez donc de me pousser au suicide tiens, ça serait marrant. Ce n'est pas ce que vous avez fait à force de vous regarder dans une glace ? Rien de tel pour taper une déprime sevère.

Il était ouvertement railleur, il ne se gênait pas, il avait affronter une chimère en rage sans faillir, ce n'était pas un truc sans forme qui allait le faire reculer. Il pouvait s'étirer jusqu'au ciel si l'envie le lui prenait que le militaire narguerait encore et encore.

-Sac d'os ? Regardez vous et on en reparle autour d'un whisky un de ces quatre.

Peut être pensait il que cela allait le destabiliser, peut être croyait il qu'il était facile d'entrainer un humain sur les sentiers qu'il refusait de prendre ? Ouais, sans doute.

-Je connais Sinatra, ouais. Que j'aime ou que j'aime pas, vous vous en fouttez alors la question n'a pas lieu d'être.

Les deux hommes se livraient à une joute verbale qui eut pu être des plus risibles si elle n'avait pas couvé une telle hargne. Sans qu'elle ait pu faire quoi que ce soit pour l'en empêcher, la situation était en train de dégénérer. Yorick, peu habitué à se faire ainsi rabrouer, semblait perdre peu à peu son humour pour se transformer en être grossier et prêt à sauter à la gorge du jeune militaire. Depuis quinze ans qu'elle connaissait l'Ombre, c'était bien la première fois que la jeune femme le voyait réagir ainsi ! L'espace d'un instant, alors qu'elle le vit s'approcher si dangereusement de son compagnon de chasse, elle en vint même à redouter le pire. Que pouvait bien faire un Yorick, déstabilisé et passablement frustré dans ses tentatives d'intimidation ? Elle ne le savait pas et n'était guère pressée de le découvrir à vrai dire...

Heureusement Maxime, lui, restait d'un sang froid à toute épreuve et pas une seule remarque ni un seul des gestes de la grande bringue ne semblait pouvoir le déstabiliser. Et malgré la profonde amitié qu'elle ressentait pour Yorick, Selene en fut ravie... Ce stoïcisme n'était pas pour lui déplaire... Loin de là même... Elle posa discrètement un tendre regard sur l'humain alors que celui ci repoussait, avec un calme olympien, la main de l'Ombre sarcastique. Plus le temps passait et plus les sentiments de sympathie de la jeune femme pour ce si séduisant humain se confirmaient. Pire même ils évoluaient ! Si jusque là elle respectait et, il lui fallait se l'avouer, elle admirait l'adversaire de demain, Selene en venait peu à peu à respecter et apprécier l'homme. Maxime était le premier humain qu'elle rencontrait et qui présente autant de ces qualités qu'elle appréciait tant : le courage (Les Ombres pas plus que les Chimères ou même les Bêtes ne semblaient l'effrayer), la détermination, le sang froid, un sens aigue de la répartie... sans compter un physique avantageux qui ne devait pas laisser beaucoup de femmes indifférentes ! De là à penser que la jeune femme était en train de succomber au charme de Maxime, c'eut sans doutes été un peu exagéré mais... après tout qui sait ?

Selene resta un moment encore interdite, ne sachant trop que faire, ni même si elle devait ou non intervenir dans cette sorte de combat de coqs qui se déroulait sous ses yeux. Mais pas plus qu'elle ne souhaitait voir Yorick en venir aux mains et ainsi risquer de blesser Maxime, la jeune femme ne souhaitait voir son ami l'Ombre blessé dans son orgueil par les remarques admirablement assassines du jeune et fringuant humain. C'était plus fort qu'elle : même si Yorick était parfois horripilant et si elle lui reprochait sans cesse d'être trop collant avec elle, Selene ne pouvait s'empêcher de le protéger et de le défendre.

Essayant, bien maladroitement il est vrai, de calmer Yorick tout en ne laissant pas transparaître son tendre penchant pour l'autre, Selene décida d'intervenir. Puisqu'ils semblaient tous deux avoir fait totalement abstraction de sa présence à leurs côtés, elle allait se charger de la leur rappeller... Mais elle ne se faisait guère d'illusion : son intervention ne changerait sans doutes pas grand chose ! On dit souvent que les femmes sont promptes à se crêper le chignon, mais les hommes eux sont parfois bien pires ! Il suffisait de regarder ces deux là pour s'en convaincre... Deux hommes se comportant comme des gamins en train de se mesurer à coup de remarques acérées, tentant de se prouver je ne sais quoi... Bousculant légèrement Maxime, elle revint prendre sa position d'arbitre entre eux deux, et l'air furibond cette fois, elle s'adressa à Yorick en premier :

- "Non mais je peux savoir à quoi tu joues là ? Au cas où tu ne l'aurais pas remarqué Maxime et moi nous étions en train de chasser avant que tu ne débarques en compagnie de ce cerf ridicule ! J'ai la courtoisie et l'amitié de te présenter cet humain et toi tu ne trouves rien de mieux que de l'agresser ?" sa voix s'était faite aussi froide et tranchante que la lame de ses dagues. Elle jeta un regard sombre vers son ami et poursuivit :

-" Non mais tu te crois où ? Et quelle est cette vulgarité qui ne te sied guère d'ailleurs ? Que je traine seule avec " un homme armé et dangereux" ne te regarde pas le moins du monde ! Et si cet homme est de surcroît un humain c'est moi que cela regarde ! Pas toi... "

Elle n'aimait pas devoir ainsi se montrer blessante envers lui mais c'était la seule façon qu'elle avait trouvée pour tenter de le ramener à la raison. Bien qu'elle connut les capacités combatives quasiment jamais exploitées de son ami, elle doutait fortement qu'en cas de combat au corps à corps cela eut pu lui suffire face à un homme tel que Maxime. D'ailleurs, si un combat venait à opposer ces deux là, Selene eut été bien en peine de choisir son camps. Elle ne pouvait trahir un ami de si longue date tel que Yorick mais, dans son coeur, elle savait qu'elle ne pourrait pas non plus prendre les armes contre Maxime. Non... elle ne le pourrait pas. Prenant sur elle, la jeune femme se calma quelque peu et s'approchant de Yorick, elle lui déposa un chaste baiser ur la joue et d'une voix calme cette fois ci lui dit :

- " Yorick... Tu sais que tu es sans nuls doutes le meilleur ami que j'ai jamais eu dans cette foutue Vallée et ce lien qui nous unit est des plus précieux à mes yeux. Aussi ne me force pas à me montrer aussi dure envers toi. S'il te plait... puis d'un geste de la main elle désigna Maxime derrière elle. Une lueur de tendresse mêlée de malice traversa alors ses yeux. A sa place cela fait déjà un bon moment que je t'aurais envoyé paître... Honnêtement, et tu me connais suffisemment pour savoir que je dis vrai, je t'aurais même mis les tripes à l'air moi ! Alors même si j'apprécie l'attention que tu me portes, je t'en prie, cesses de te comporter comme mon père ! Ou pire comme... enfin bon, tu vois ! "

Selene se tourna alors vers Maxime et l'air quelque peu embarassé, se sentit presque obligée de lui présenter des excuses. C'était bien la première fois qu'elle s'excusait auprès d'un humain ! Qu'avait donc celui ci qui le rende si particulier à ses yeux ? Mystère... Même elle n'était pas vraiment sure de le savoir. Adressant un clin d'oeil si ce n'est amical du moins complice à l'humain, elle lui rendit son salut militaire et lui dit doucement :

- " Moi aussi je tiens mes promesses m'sieur ! Et le temps jouant en notre faveur, je suis certaine que nous aurons tout le temps pour nous mesurer l'un à l'autre... Il semblerait cependant que cela doive attendre un peu... Coulant un regard en biais vers son ami resté quelque peu en retrait elle ajouta d'une toute petite voix presque aussi candide que celle d'un enfant Quant à Yorick et ses élucubrations sur Sinatra que veux tu... Il est comme ça. Mais il aboye bien plus fort qu'il ne mord... Je pense qu'il est juste un peu vexé de rencontrer pour la première fois un humain tel que toi, aussi imperméable à son humour quelque peu... " particulier" dirons nous. Quant à moi, j'avoue que j'apprécie assez... acheva t'elle d'une voix tout juste audible.

Autour d'eux la neige avait peu à peu recouvert toute la forêt et l'on ne voyait rien d'autre à l'horizon qu'un épais tapis blanc. Le froid sembla soudainement redoubler d'intensité et Selene, malgré la veste si élégament prêtée par yorick, ne put retenir un frisson. Ses yeux allaient d'un homme à l'autre et la jeune femme se demandait non sans une légère anxiété, lequel allait reprendre les hostilités.

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Yorick ne bougea pas. Pendant toute la réplique (cinglante d'ailleurs) de Maxime, et jusqu'à la fin du commentaire de Sélène à son adresse, il ne bougea pas. Il resta dans cette même position, un bras le long du corps après que le Chasseur l'ait déplacé, l'autre avec un l'index pointé vers son visage. Penché fixement comme ça, on aurait dit un épouvantail en costume cravate. Inutile de dire qu'il avait l'air très élégamment ridicule. Mais le plus déstabilisant était sans doute son expression, neutre et ahurie, comme suspendue en pleine inspiration. Immuable dans sa drôlerie muette. Pas même quand Sélène l'embrassa sur la joue.

Il s'anima enfin lorsqu'elle eut fini de lui parler, mettant ses mains dans ses poches, mais restant penché au-dessus de Maxime. Sur son visage il y avait un air véritablement penaud.
Bon, bon...désolé. Mais vous êtes vraiment un client difficile, vous...ajouta-t-il avec un sourire en coin à l'adresse du Chasseur.

Il lança un regard espiègle à Sélène, puis un petit coup de menton en direction de l'Humain.
Je vois ce qu'elle vous trouve, dit-il, avant de sourire plus largement, d'un air profondément amusé. Vous êtes à peu près aussi imperméable et exaspérant qu'elle. Pas vrai, ma puce ?
Haussant les épaules d'un air fataliste, il poursuivit, son regard froid fixé sur Maxime.
La conversation ne marche pas, l'intimidation non plus...je suppose que je n'ai plus qu'à attendre...
Il plissa les yeux et sourit légèrement.
Que vous changiez d'avis, que vous soyez débranché, que vous mourriez ou que vous ressortiez...Quelle importance ?
Changeant brusquement d'attitude, il posa sa main sur l'épaule du Chasseur et prit un air mi-sérieux, mi-souriant.
Mais vous savez, j'étais sérieux pour Sinatra...

Sifflotant l'air de "Fly me to the Moon", il se détourna et laissa ses pas le faire dériver un peu à l'écart. Mais lorsque Sélène fit de nouveau preuve de complicité envers Maxime, il laissa échapper un soupir.
Oh pitié...fais-lui l'amour puis tranche-lui la gorge directement, tu sauras ce que tu veux pour une fois ! Mais si ça ne te dérange pas, autant le ramener au Manoir...parce que je ne sais pas pour vous, mais Jack m'a dit que les nouveaux locataires n'étaient pas commodes...
L'air froid et la bise redoublèrent de menaces, tandis que le décor prenait de plus en plus l'aspect d'un désert blanc, piège immaculé et impitoyable...

Maxime continuait de fixer l'échalas d'un oeil luisant. Il ne savait pas pourquoi mais ce guguss lui sortait par les trous de nez. Une furieuse envie de lui coller une balle entre les deux yeux le saisit, mais il retint cette impulsion. Cela n'aurait servit à rien. Finalement, Sélène vint se placer entre eux et donna une petite leçon de moral à l'asperge. Evidement, il nota son coup d'oeil tendre et il faillit répondre par un clin d'oeil taquin. Oui, il l'aimait bien et non, il ne l'afficherait pas en présence d'un tiers. Il lui dit carrément de soit faire l'amour avec le militaire et de lui trancher la gorge comme tout bonne mante religieuse qui se respecte. Non mais il n'allait pas bien le haricot ! Il n'était pas un homme facile et aussi attirante que soit Sélène, il était à peu près sur de se faire jeter si il tentait quoique ce soit avec elle. Sans compter qu'il ne voulait pas finir vidé de toute substance dans un coin à la première dispute. Il allait répondre vertement lorsqu'un rugissement déchira le silence, aussitôt suivit d'un hurlement qui lui vrilla les oreilles. Son sang s'échauffa soudainement, son taux d'adrénaline décupla d'un coup et son visage se ferma subitement.

-Je crois qu'il ne vaut mieux pas que vous trainiez ici.

Déjà il s'éloignait, il courrait vers cette voix qu'il avait reconnu entre mille. Mirahil ! L'arme était de nouveau apparue dans sa main et il courait comme un fou vers l'endroit d'où venait le cri de douleur, de desespoir....Un cri qui lui donnait le frisson...

>>> Rage et desespoir

Invité

Un cri, quelques paroles, un baiser sur la joue et les voilà partis. Tous les deux. Et Yorick resta un moment interdit, dépassé par le changement brutal. Tendant le regard et le cou vers les deux silhouettes qui disparaissaient dans le paysage immaculé, il sembla être pris, pendant quelques secondes, dans un dilemne d'une rare intensité. Puis il prit sa décision et la ponctua d'un :
Oh et merde...
Et se mettant lui aussi à marcher, il se dirigea vers la clairière des nouvelles arrivées, bien décidé à profiter de sa journée.

=>Occupation incongrue d'un nouveau...

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