A travers les arbres, elle... (Allen)

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ploc ... ploc ...
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ploc ploc ploc ploc ploc ploc ploc ploc

La petite Sarah court et appelle à l'aide.
La jeune Sarah est seule, perdue, triste.
La petite Sarah est à nouveau enfant.
La jeune Sarah n'entend plus le sombre qui gronde.
La petite Sarah ne sait pas où elle est.
La jeune Sarah ne sait pas où aller.



Elle crie, elle court, elle tourne, elle se retourne, elle court, elle se cogne, elle trébuche, elle tombe, elle retombe, se relève et repart, elle court, elle se vide les poumons, elle crie, elle espère, elle cherche, elle...





La forêt est écrasée par la pluie, la forêt est alourdie par la pluie, la forêt est assourdie par la pluie.
Il n'y a donc personne qui entend son cri ?




Elle court l'enfant Sarah, seule dans la forêt, seule sans abri, sans bras pour la protéger, la réconforter, l'aider, sans ami, sans mère, sans ...
Il ne reste que des reflets de roux dans ses cheveux bruns.




La pluie l'a changée, l'a lavée, l'a purifiée, la pluie à enlever le petit monstre qui était en elle. Mais






Une clairière.
Il n'y a plus d'arbres contre lesquels se cogner, il n'y a plus d'arbre contre lesquels se cacher, il n'y a plus d'arbres derrière lesquels espérer. Vide immensité infini vide







écorchée, égratignée, essoufflée, épuisée, esseulée... quelques pas encore.

Quelques pas sans aucun souffle, sans aucune voix, sans autre son que l'incessant bruissement clapotant de la pluie. Quelques pas encore et

Elle abandonne, elle se laisse aller, elle se laisse tomber.

Elle pleure encore, comme si l'eau tombant du ciel entrait en elle pour mieux ressortir par ses doux et petits yeux.

Elle enlace ses genoux, et les serre avec force et conviction, désespérément, à défaut de couette, de doudou, de peluche, à défaut d'une maman...

Solitude, solitude de l’enfant qui a peur, de l’enfant qui est seule. Genoux contre elle, elle serre, et cherche en elle les réponses, tant de questions se bousculent, tant de questions, tant de questions dont elle ne trouve pas la réponse.

Que fait-elle ici ? Où est sa mère ? Pourquoi sa mère n’est-elle pas avec elle ? Quel est cet endroit ? Pourquoi fait-il si froid ? Pourquoi est-elle si seule ? Pourquoi la vie s’acharne sur elle ? N’était-elle pas seule, tranquille, enfermée dans un cocon, mais protégée, réconfortée, aimée, emmitouflée de chaleur, et là, là, elle a froid, elle a mal, elle a peur.

Et cette pluie… Quelle est cette pluie, qui semble tout laver, tout mettre à neuf, mais qui, en même temps, semble si sale, une pluie sale, sombre, néfaste, effrayante, une pluie désagréable, qui colle, qui colle à la peau et à la âme, qui nous trempe jusqu’au os, jusqu’au cœur, une pluie si fine et si lourde, insistante, persistante, dérangeante.





Elle lève des yeux terrifiés, effrayés vers l’homme qui a posé la main sur son épaule. Elle recule, comme un animal apeuré, animal effrayé qui cherche à se protéger, qui cherche à s’éloigner. Le visage humide de pluie et de larmes, les cheveux collés au front, salis et emmêlés, elle est sale, écorchée, égratignée, elle recule.
Elle a peur.

Elle n’aime pas cet endroit.

Mais, sa voix, son attitude, son visage… réconfortant, son âme d’enfant entoure l’inconnu d’une lumière douce et agréable, d’une lumière qui promet de chasser nos peurs.

Elle court, s’élance et enlace les jambes du jeune homme, de toutes ses forces, de toute sa force de petite fille, de toute sa peur, de toute sa tristesse, de toute son enfance ébranlée, de toute son innocence menacée.
Et elle pleure, elle pleure à nouveau, blottie contre les jambes de cet inconnu, de cet être qu’elle ne connaît pas.

« J’ai peur, sa voix est coupée, hachée de sanglots, tremblante de peur, grelottante de froid, fébrile de tristesse. »

Un lit d'hôpital où est allongée une petite fille malade et fragile.
Des petits tubes sortent de ses petits bras.
Elle est malade.
On l'a soigne.

Son père est au travail. Il travaille de plus en plus. C'est son échappatoire. C'est sa façon de se changer les idées, sa façon de ne pas penser que sa fille meurt et qu'il ne peut rien faire.

Sa mère est à la cafétéria. Elle boit son sixième café de la journée. Elle est fatiguée, ses yeux sont rouges et gonflés. Elle est assise dans un coin, elle se repose un peu avant de retourner dans cette chambre qu'elle déteste, cette chambre où elle doit apprendre à dire au revoir à sa fille, à son enfant.

Il y a du mouvement dans la chambre, la porte s'ouvre et entre un jeune homme tout silencieux, tout triste et respectueux.

C'est son grand frère, son merveilleux grand-frère qu'elle aime et qui l'aime. C'est le plus grand, le plus beau, le plus fort, c'est le meilleur son grand frère.

Il s'assit à côté du lit, et prend la petite main si pâle et si fragile de sa petite sœur si pâle et si fragile. Il retient ses larmes, il veut lui sourire.

C'est la consigne générale : Ne lui présenter que des visages souriants.

"Sarah ? Ma belle..."

Sa voix est douce, tendre
sa voix est murmure,
peu assurée.

La petite fille ouvre les yeux, lentement, péniblement, elle tourne la tête vers son frère, lentement, péniblement, elle lui sourit, lentement, péniblement.

"Micky"

Mais...

Ceci ne fut, et ne sera qu'un rêve. Elle n'a jamais eu de frère l'enfant, toujours seule, aucun grand frère pour l'aimer, pour la protéger. Mais son cœur en voulut un, son esprit en créa un.

N'est-il pas revenu cet être être de ses rêves ?

Elle croit reconnaître sa voix, ça peut être elle, ça doit être elle... son esprit se trouble... se brise...



Elle s'écarte, les petits poings frottent les petits yeux, elle lève la tête, le regard. C'est lui ? C'est lui.

C'est lui !

Et elle se jette à nouveau contre lui, et le serre à nouveau, encore plus fort, encore plus fort maintenant que c'est son frère, encore plus fort maintenant qu'elle sait que c'est lui, encore plus fort pour qu'il ne puisse plus s'en aller.

"Micky ! Où était-tu ? Où est maman ? Micky, j'ai peur. Où on est ? Oui, oui Micky, emmène-moi ailleurs ! Je veux voir maman. Emmène-moi !"